Le ciel moire
Je marche ailleurs
dans l’épicentre de la lumière
Il suffit d’un pas et la terre frémit
Les grains de quartz se souviennent de chaque foulée
D’un bain de boue pointe une vapeur d’être
D’une lumière artificielle pointe un faux-semblant
Le ressac essentiel du sens
est ébranlé
L’éperdu poème
est perdu
Une autre histoire s’endort dans les nuages fatigués
Ferveur coupée en deux
D’un côté la terre meuble et l’usure des soirées d’apparats
de l’autre la lumière sable et ses traces de pieds nus
Reste de l’écorce élimée
ou de la substance infinie
Au centre
tout est convenu
Même le point de fuite ne veut pas mentir
La brisure est limpide
L’horizon vertical laisse l’illusion d’un astre éclatant
Dessous
la vie nocturne
Dessous encore
l’empreinte d’un dinosaure
À l’envers
l’apparition d’une pierre philosophale
Aller vers où ?
Vers ce lieu que l’on croit en terre
peut-être en ciel
en eau folle certainement
Avancer et n’être
l’attention que de l’autre
Avancer et n’être
attentif qu’à l’autre
Ébloui par ce visage rivage
Ciel
vagues
plage
béton
la parfaite garniture des bords de mer
Le sauvage manquant foudroie la vision lisse des nuits de casinos
Le gisant du lendemain sera collecté par des éboueurs aguerris
Je suis celui-là qui essaie de se relever
préférant être gisant-vivant
que mort-automate
Et ce ‘nous’ clairsemé dans les lignes du ciel
Faut-il croire encore à ce parcours en duo ?
En chacun
est cette paire
dont la frontière rythmique est poreuse
rectiligne et floue successivement
À la racine de l’être
nous nous retrouvons
À la surface
l’expérience n’est que dialogues emboutis
Source première de nos corps allants
n’avez-vous jamais senti l’épicentre de la terre ?
Léonard Piétri, 2025
(Poésie écrite à partir d’une photo de bord de mer urbain)
